Le démantèlement du bâtiment B14 est en cours à Fleurus. Ce bâtiment abrite notamment 2 cyclotrons (CGR et IBA) entourés d’épais murs de béton devenu radioactif. Une extension est en construction qui recouvrira la zone du cyclotron IBA. Elle permettra de maintenir la radioactivité confinée lors de la découpe et la manutention des blocs de béton radioactif.
En octobre 2021, l’ONDRAF a finalisé le bardage extérieur de l’extension au bâtiment B14. Le concept de cette zone d’extension a été mis au point par Tractebel Engineering. La construction a démarré en 2020 et se poursuivra jusqu’en avril 2022. Les explications de Michel Gaelens, chef de projet à l’ONDRAF, et Kim Honorez, cheffe de projet chez Tractebel Engineering.
Michel, pourquoi cette extension est-elle nécessaire ?
Michel Gaelens : « Les murs en béton de 2,5 mètres qui entourent les casemates (bunkers) où se trouvent les cyclotrons sont « activés », c’est-à-dire radioactifs, sur une certaine épaisseur. Ils vont être découpés au câble diamanté, un processus qui génère des poussières radioactives. Tout l’enjeu est donc de confiner ces poussières dans un bâtiment qui vient se greffer au bâtiment B14 existant. »
« Lorsque les opérations de démantèlement seront terminées, nous pourrons facilement décontaminer et démonter cette extension. Il s’agit ici d’un dispositif permettant d’assurer la sécurité des travailleurs, de la population et de l’environnement. »
Quelles sont les dimensions de cette extension et comment est-elle conçue ?
Kim Honorez : « L’extension mesure 33 mètres de long sur 26 mètres de large et 13,5 mètres de haut. Elle est construite sur une dalle de béton reposant sur 51 pieux profonds de 12 à 13 mètres et comprend trois zones :
- la zone de confinement à risque de contamination où les équipes vont découper les murs et plafonds en béton jusqu’à atteindre le niveau d’épaisseur non radioactif ;
- un sas de découpe où les pièces de béton provenant des murs et des plafonds seront découpées et emballées ; ce sas présente donc aussi un risque de contamination ;
- une zone d’extension dite « propre », sans risque de contamination, où chaque bloc de béton emballé fera l’objet d’une mesure radiologique avant d’être mis en conteneurs expédiés vers la filière de stockage appropriée. »
« Ceci explique la nécessité de monter deux ponts roulants pour manutentionner ces bétons : un pont fonctionnant exclusivement en zone à risque de contamination et un autre exclusivement en zone ‘propre’. »
« Une dalle de béton a été également construite à l’extérieur de l’extension pour entreposer les conteneurs de déchets avant expédition. »
Quel a été le défi majeur pour Tractebel Engineering ?
Kim Honorez : « Nous avons été confrontés à plusieurs défis. Tout d’abord le concept en lui-même : construire un bâtiment provisoire qui se greffe à un bâtiment nucléaire en phase de démantèlement. Cela impose de nombreuses contraintes en matière de robustesse, d’étanchéité et de sécurité notamment. Il fallait s’assurer qu’après découpe d’une partie des murs et plafonds existants, le bâtiment puisse toujours supporter le poids de la zone de confinement qui le surplombe. »
« Quant à l’étanchéité, aucune poussière ne peut s’échapper vers la zone « propre ». Les systèmes de ventilation sont donc conçus pour que les flux d’air circulent de la zone « propre » vers la zone à risque de contamination. »
« Il faut ajouter que le bâtiment existant est ancien et que les plans n’étaient pas toujours à jour. Enfin, plusieurs équipes travaillent sur le site : les équipes de démantèlement et celles de la construction de l’extension. Un coordinateur de sécurité est donc présent en permanence pour gérer ces interactions et garantir la sécurité. »
« Nous avons été confrontés à plusieurs défis. Tout d’abord le concept en lui-même : construire un bâtiment provisoire qui se greffe à un bâtiment nucléaire en phase de démantèlement. »
Kim Honorez, Tractebel Engineering
Cette extension sera-t-elle décontaminée et démontée ?
Michel Gaelens : « Elle sera décontaminée et démontée en 2028. Pour le bardage intérieur, nous avons opté pour un revêtement métallique lisse et non poreux, quasiment plane, qui permettra une décontamination aisée en surface. Trouver le matériau adéquat a d’ailleurs été un défi aussi car la plupart des matériaux sont légèrement ondulants, ce qui empêche la prise de mesures radiologiques en surface. Quant à l’acier utilisé pour la charpente, il pourra éventuellement être valorisé. »
Et qu’en est-il des blocs de béton ?
« Conformément à la nouvelle réglementation en vigueur, les 2000 tonnes de béton activé seront expédiées dans une installation de stockage dédiée et sécurisée, pour une période bien au-delà de la décroissance quasi complète de la radioactivité, et après une étude d’impact validée par l’Agence fédérale de Contrôle nucléaire (AFCN). »
« Le processus complet de découpe, d’évacuation et de stockage des blocs de béton sera d’ailleurs contrôlé de près par l’AFCN. Quant aux blocs de béton non activé, qui représentent quelque 9000 tonnes, ils pourront être valorisés dans une autre filière, comme la construction de routes. »
« Le processus complet de découpe, d’évacuation et de stockage des blocs de béton sera contrôlé de près par l’AFCN. »
Michel Gaelens, ONDRAF